tremendum

« Dans ce goût de l'amertume, il y a la conscience de l'agitation délétère du monde, et une aptitude à résister, parfois par l'engagement, parfois par la vis comica, parfois par l'échappée, la fuite même, l'évasion, le « hors de ». Régulièrement ne pas y être, ne plus y être. Une aptitude à la furtivité. Le territoire littéraire permet de sublimer tous les ressentiments et de goûter précisément l'amertume des choses, des êtres, des idées. Mais il existe des territoires symboliques qui ne sont pas ceux de la littérature, et qui peuvent nous apporter ce « magistral » dont nous avons besoin pour ne pas sombrer. Le goût de l'amertume, développer cette faculté, nous aide à devenir des arpenteurs du monde. Parce que nous ne craignons pas ce goût, parce que nous savons l'apprécier, il augmente la densité du monde, disons plutôt notre compréhension du monde. Ce goût de l'amer est aussi une façon de guérir du ressentiment. »

— Cynthia Fleury, philosophe et psychanalyste / « Ci-gît l'amer - Guérir du ressentiment », éditions Gallimard, 2020 — 
(Photographie : dans mon Digital Revio, ci-gît l'été...)