Stercoris
Qui plus est,
qu'il est triste
et laid
le vilain petit
chant militant
de l'humanité
perdue
qui, de surcroît,
espère
sans espoir.
Si j'ose dire...
— Dans mes carnets, fragments —
Qui plus est,
qu'il est triste
et laid
le vilain petit
chant militant
de l'humanité
perdue
qui, de surcroît,
espère
sans espoir.
Si j'ose dire...
— Dans mes carnets, fragments —
— Table de travail, août 2020, nouveau livre toujours en cours / page 130 —
(Thierry Murat © Futuropolis / Parution prévue aux alentours de l'an de grâce 2021)
J'aime quand les jours
raccourcissent.
J'ai le sentiment
que ça laisse davantage
de temps au silence.
Mais ce n'est qu'un leurre ;
le silence se fout royalement
des calendriers.
J'entends gueuler dehors.
Ils veulent encore qu'on les aime.
J'ai pas envie.
Le ramollissement
de la courbure
de l'espace-temps
devrait nous permettre,
en théorie,
de voir plus loin que l'habitude ;
ce qui est peut-être un progrès,
finalement.
Ne voir que les yeux
sur les figures des figurants
me suffit.
La bouche est souvent plus sale
qu'un trou du cul.
Quant au nez, c'est l'idiot du visage.
— Dans mes carnets, fragments —
(Dans mon Digital Revio, Opensky)
— Dans mes carnets, petits fragments nietzschéens —
(* disponible en avant-première sur tous les meilleurs campus de sciences po)
Cinq ans après, les cons ne sont plus Charlie. Et c'est « temps mieux »... Aujourd'hui, au delà du procès des fantômes des frères K, s'ouvre le procès de la lâcheté, celui de la petite France mesquine qui, du bout des lèvres, ose encore murmurer « oui, mais... ils l'ont bien cherché avec leurs vilains dessins... ». Aujourd'hui, s'ouvre le procès de ce pays de couards qui a réhabilité le péché de blasphème en rendant la satire et la raillerie suspectes et le rire illicite. Le procès de ce pays de tristes cons qui sacralise l'intolérance, la délation, le lynchage médiatique, la présomption de culpabilité, la vindicte populaire, la censure, l'importation US de la cancel culture... et qui a mis définitivement au pas – en seulement cinq ans – une société de libertés qui permettait de critiquer et de se moquer librement de tout ; de toutes les religions, de toutes les croyances, de toutes les idéologies, de tous les particularismes et de tous les mots en isme. Si les cons ont presque gagné, ça ne veut pas dire que Charlie a perdu. L'audience est ouverte, vous pouvez vous asseoir. Les survivants vont témoigner debout.
— Dans mes carnets, fragments —
(Dessin de Charb, 9 novembre 2011 / Charlie Hebdo N°1012)
C'est avec le vent,
avec la pluie,
avec le bois sec stocké pour l'hiver,
avec la soupe aux cailloux
qui ronronne sur le poêle
à quatre pattes dans la boue,
et avec les os de la forêt qui craquent
dans la brume du matin,
qu'il faut défricher humblement
nos forces naturelles instinctives
et ancestrales.
Loin des mirages d’adulescents bio-urbains
mal connectés à l'essentiel.
Loin des colères névrotiques
des villes vertes de rage.
Loin du jeunisme citadin en trotinette,
et de ses slogans activistes
formatés pour smartphones
qui piétinent la ruralité originelle
et immémoriale des anciens.
Ma généalogie paysanne me chuchote
que l’état sauvage est une certitude
à chérir au fond de l’âme
en toute individuité.
Fuck you, little city rat. Im a survivor.
— Dans mes carnets d'automne, écrire des fragments —
(Dans mes carnets oubliés, dessin sauvage et inédit de 2016 © TM)
Rituel ultime ;
Reblanchir à la chaux la tanière griffue
Avant les premiers frimas en embuscade,
S'acquitter de l'intime escapade
Comme un été indien toujours à l'affût.
Et embrasser la rime.
— Dans mes carnets, écrire des fragments d'ici —
(Dans mon Digital Revio, white light white heat)
« Un pressentiment obscur nous avertit qu'ayant un corps, ce corps projette implacablement une ombre, et que si nous ne faisons pas entrer ce côté négatif de notre nature dans son ensemble, nous ne sommes pas complets ; si nous nions ce corps, nous ne sommes plus des êtres à trois dimensions, mais des êtres aplatis qui ont perdu leur essence. Or ce corps est un animal, avec une âme animale, c'est à dire un système vivant qui obéit de façon absolue à l'instinct. S'allier à cette force obscure, cela revient à accepter l'instinct. À vouloir détruire l'obscur, on détruit la forme de toute une personnalité. Sans ombre, une forme vivante n'est qu'un fantôme ou un mirage à deux dimensions, et dans le meilleur des cas, un enfant — plus ou moins bien élevé.
Plus cette ombre est refoulée, isolée de la conscience, plus elle est noire et dense. Et moins elle pourra être corrigée ; constituant ainsi un danger latent, susceptible de surgir soudainement à tout instant. »
— Carl Gustav Jung (1875-1961) —
(Dans mes carnets oubliés, dessin inédit de 2012 © TM)
C’est aussi vieux que le monde est vieux (et aussi vrai que les certitudes sont souvent fausses) : la schizophrénie de la vox populi transforme toujours le forum en barnum. Le joli mois de mars, avec son trouillomètre au taquet, s’indignait de la pénurie de masques et bramait contre les monarques incompétents, incapables, coupables, et irresponsables (sic). Et puis voilà le gentil 15 août, avec ses congés payés, qui se sent soudain pousser des ailes de rébellion paranoïaque anti-muselières-totalitaires (sic)... Par bonheur, dans sa verticalité pleine de sagesse, la figure christique marseillaise du saint-sauveur qui guérit les lépreux, apaise les braises de l’infamie. Et la divine lumière antisystème des rebelles réveille enfin le bétail dans sa furieuse et grégaire envie d’aller s’abreuver en terrasse. Nu sous son gilet fluo à l’heure de l’apéro, voici venir la vérité qui postillonne à visage découvert : la science, nom de Zeus ! Rouler une galoche à une vieille nymphomane en réanimation dans un ehpad ; lui arracher violemment son respirateur et braver le virus jaune, tel un Napoléon ignorant superbement la peste à Jaffa. Soyons impériaux et héroïques et ayons l'air du temps ! (Bordel de merde !)
— Dans mes carnets, écrire des fragments hérétiques —
(Jérôme Bosch, 1490 / « L'extraction de la Pierre de folie » (ou L'opération burlesque) / Huile sur bois, 48 x 35 cm / détail)
Reload...
La surpopulace psychotique
en surchauffe planétaire
perdue échouée
surfe sur les brisants
des délires sociétaux
postmodernes et névrotiques.
Trending content...
Tyrannie des particularismes.
Marketing de la pensée opportuniste.
Culte de l’insurrection permanente.
French Theory.
Révisionnisme revanchard.
Cancel...
Écoute le beuglement
des zinternaute·e·s
zidéologue·e·s
du camp du bien
en ruine.
Shipwreck...
— Dans mes carnets, écrire des fragments —
(Dans mon atelier, rust never sleep)
Acerbe, intraitable, solitaire, craint pour ses remarques cinglantes, Edgar Degas (1834-1917) s'est brouillé avec tous ceux qui ont croisé sa route, jusqu'à ses amis les plus proches. Lorsque la lucidité ferme la porte à toute attente envers le genre humain, c'est peut-être là le cadre idéal pour espérer voir surgir, comme par miracle, des rencontres d'exception ; le dénouement éternel d'une errance exigeante.
Autre question, à propos de la misanthropie ?...
— Monotype sur papier / Edgar Degas, 1880 —
Chez Alexander Calder (1898-1976), tout commence par une simple ligne. Calder était un dessinateur dans l’espace. Au début, cela ressemble davantage à la démarche d’un caricaturiste qu’à celle d’un sculpteur. Et puis la ligne de fil de fer évolue librement en trois dimensions par assemblages de bric et de broc, jamais très loin du pays de l’enfance, jusqu’à faire aboyer les ombres.
— « Dog », 1930 / Bois, pince à linge et fil de fer, 9,6 x 14,3 x 3,8 cm /
Calder Foundation, New York —
« Lorsque nous réfléchissions au dit pop art – bien que je ne trouve pas que ce soit une bonne idée de réunir des artistes sous une même étiquette, en supposant qu'ils font la même chose – nous partions du point de vue que tous ces artistes essayaient de prendre des distances par rapport à leur œuvre. En ce qui me concerne, je voulais paraître mécanique et impersonnel dans mes travaux ; je crois cependant que je ne suis pas impersonnel quand je peins. Et je considère même qu'il est impossible de l'être. »
— Roy Lichtenstein (1923-1997) —
« Rouen Cathedral (Seen at Three Different Times of Day) », 1969 /
Magna sur toile / Triptyque : (3x) 107 x 160 cm
Les portraits de Lorenzo Lotto (1480-1556), à l'opposé de ceux du Titien – son illustre contemporain homologue – sont des portraits psychologiques ; les tout premiers dit « portraits-dialogues ». La description précise et physionomique n’est pas ici la priorité. Plutôt que de fixer le personnage tel qu’il est objectivement, Lotto préfère le montrer à l’instant ténu où il se qualifie, où il s’adresse à l'autre, et se prépare à un rapport humain sincère. Les portraits de Lorenzo Lotto ne disent pas : « admire-moi, je suis le roi, le pape, le doge, je suis le centre du monde » ; ils disent plutôt : « voilà comment je suis fait à l’intérieur, voilà quels sont les raisons de ma mélancolie ou les fondements de mon existence ». Dans le portrait-dialogue, l’attitude du peintre est celle d’un confesseur, d’un interlocuteur privilégié qui pose les questions et interprète les réponses. La beauté intérieure du modèle est trahie, plus que révélée.
— Lorenzo Lotto « Portrait du jeune homme à la lampe », 1506 /
Huile sur panneau de bois, 35 x 42 cm —
Thierry Alonso (dit Gravleur) est né à Paris en 1966. On dit de ses immenses portraits crus et égarés qu'ils ont la puissance sombre de ceux de Rembrandt, même si le blanc y envahit souvent l'espace. Depuis 2006, ses amitiés avec Johnny Depp et Nick Tosches lui permettent parfois d'exposer à Los Angeles, à des années-lumière de la grisaille humide de la Beauce où il se taire depuis 1995 dans la solitude rurale de l'Eure-et-Loir.
— Connoisseur's Gallery © Somogy Art Publishers, 2009 —
Certaines sont effrayées par l'image symbolique du phallus et détestent l’idée de sa toute-puissance – même si elles rêvent parfois de s'en faire greffer un. Ce n'est apparemment pas trop le cas de Sarah Lucas. Et comme on dit ouvertement dans les milieux autorisés, voilà une femme qui aime la bite !
Née en 1962, étudiante en arts visuels au Goldsmiths College, elle devient rapidement dans les années 80 une des principales têtes d'affiche du groupe des Young British Artists. Elle réalise des moulages du pénis de son mari, de ses amants, de ses amis et s'adonne joyeusement au culte fragile des totems. Et si ce souverain érectile n'était finalement qu'un roi sans divertissement...
— « The King », 2010 / Moulage-sculpture de Sarah Lucas /
Photographies © Julian Simmons / Triptyque : (3x) 75 x 103 cm —
À partir de 1964, Andy Warhol revisite avec sa série des « Flowers » la tradition de la nature morte. D'une série à l'autre, il compare les cadrages, les formats, les déclinaisons chromatiques, il expérimente les différentes techniques de sérigraphie, d'aérosols, d'encres acryliques fluorescentes, et pousse à l'extrême – jusqu'à la saturation visuelle – la reproduction mécanique de l'image manipulée. La représentation de ces hibiscus à profusion provoque inévitablement l'euphorie sexuelle d'une allégorie psychédélique de la femelle en fleur, de la flore vaginale, ou de la vulve pop luxuriante.
— Dans mes carnets, petits fragments d'histoire de l'art —