Ratage (fragments de)
William Faulkner disait qu'un romancier est un poète raté.
Effectivement...
Le poète continue de fouiller dans les entrailles du langage, coûte que coûte,
afin de trouver Le mot miraculeux – puissant comme une incantation –
qui nous fera prendre conscience, en une dizaine de lignes,
de l'immensité cosmique qui sépare le fade du sublime.
Le romancier, lui, abdique...
Et il écrit des centaines de pages d'ennui. De trop longs récits d'aventures,
historiques, politiques, ou autobiographiques, ou à l'eau de rose.
Ou bien des enquêtes policières qui n'en finissent pas de finir...
Un peu comme l'on passe à côté de ses rêves en exerçant toute sa vie
un « vrai » métier très-très sérieux, en apnée, tout cramoisi,
en oubliant de respirer le monde.
Et Virginia Woolf de conclure, dans son journal, en terminant
son best-seller « The Years » :
« C'est un livre à la fois mort et décevant. Jamais plus je n'écrirai
un livre aussi long. »
– Dans mes carnets, écrire des fragments de méchanceté assumée
et puis composer un codicille en forme de cantate –
(rien à voir avec mon nouveau livre en cours, quoi que...)
Image : manuscrit de Gustave Flaubert